Cadre

Résidence artistique au Lycée Professionnel Agricole de Rivesaltes

point Elsa

Aujourd’hui. Dimanche 29 octobre 2006
Je me questionne sur la résidence, sur notre création lors de cette résidence.
Nous avons été choisi pour un projet, qui est de poser un cadre de travail artistique, d’attendre : attendre entre nous l’initiative d’une création commune, attendre pour voir l’influence du contexte du cadre sur notre travail, attendre de voir l’influence du cadre sur le contexte : le site et la communauté scolaires. Et ensuite créer.
Aujourd’hui, c’est les vacances. Mais notre cadre existe au cœur du lycée, dans la cour. Il est posé. Tout reste à faire, ou beaucoup a été fait.
En effet, nous sommes payés pour habiter le lycée durant 6 semaines. Et c’est ce fait qui questionne le plus, et sur ce quoi il y a le plus à relater, d’où le blog.
Quelle est la place de l’artiste, qu’est ce qu’il amène, qu’est ce qu’il questionne.
L’action au CDI, où nous mettons un tas de question sur de multiples bouts de papiers multicolores pour que les élèves répondent, est peut-être l’acte majeur de notre séjour, puisque nous les emmenons dans notre recherche.
Qu’est ce qu’un cadre de travail, comment il se crée, comment peut-il fonctionner. Qu’est ce que créer, produire, sentir, à quoi ça sert ? C’est la principale question des élèves : à quoi ça sert votre toile d’araignée dans la cour, à quoi ça sert ce que vous faites ?
Ils nous voient sérieux, nous poser des questions sur où, comment, tendre ces cordes, faire des nœuds penchés sur notre livre, tresser…
Mais quand est-ce que vous commencez ? est la seconde question.

On a créé un cadre, au milieu du lycée : 9 mètres cube pour travailler, suspendu, fragile.
Rien n’a été endommagé, le cadre est respecté. Ils attendent autant que nous sur ce qu’il va s’y passer.
Nous avons donc posé notre cadre, postulat 1 de toute création. Pour cuisiner, bricoler, étudier, dessiner, écrire, travailler : il faut des conditions pour réaliser.
Maintenant à nous, ensemble de créer, où du moins de travailler à cette création.
Va t-on réussir à faire évoluer ce cadre vers un lieu de liberté créative pour danser, filmer, performer, proposer des choses bizarres (ce qu’on fait est généralement nommé de bizarre par les élèves), y introduire cette même liberté pour les profs, les élèves, les agents de faire des choses bizarres en toute impunité dans le cadre ?

L’acte de création, c’est aussi se permettre de faire en toute sérénité des actions dont le résultat ne sera pas forcément en dur, visible.
Nous travaillons lors de cette résidence sur la trace. Qu’est ce qui traverse le cadre ? que traversons-nous dans ce cadre ?
Si on décide de cuire des crêpes dans le cadre, si un prof décide de faire cour dans le cadre, si on décale on hors-cadre, est-ce une création ?
En tout cas, la trace de cet acte questionnera, et amusera ou pas.
Le cadre construit est déjà une œuvre artistique, puisque nous sommes dans le lycée en tant qu’artistes, et que nous l’avons construit. Donc est-ce que tout ce qui va traverser le cadre sera aussi œuvre, ou événement, ou performance ?

Dans quelle case du monde artistique contemporain se situons-nous ? à quel courant nous affilions nous ? Ça, ce sont plutôt des questions de profs.

On cherche.
Harmonie, élève de bepa-sp2 au CDI m’écrit sur un bout de papier, « mais pourquoi toutes ces questions ? » en insistant dans le regard, et dans la main qui me le tend.
Je n’ai pu que répondre : parce que j’en ai besoin.